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Le Procureur spécial près la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (Criet), Mario Mètonou, a annoncé le jeudi 6 juin 2024, à travers une déclaration de presse (lire ci-dessous), l’arrestation de cinq Nigériens qui se seraient introduits frauduleusement sur le site de la station terminale de Wapco-Bénin à Sèmè-Podji, avec la complicité de l’administrateur général de Wapco-Bénin. A la suite de cette déclaration, les ministres du Pétrole et de la Justice du Niger étaient également face aux médias à Niamey. Ils donnent un ultimatum au Bénin pour la libération de leurs ressortissants arrêtés. Faute de quoi le Niger fermera son pipeline. A les croire, ces derniers étaient en mission au nom du Niger pour superviser le chargement du pétrolier quand ils ont été interpellés par la Police.
Déclaration de presse du Procureur spécial de la Criet
Mesdames et messieurs,
Le 05 août 2019, la République du Bénin a conclu avec la société West African Oil Pipeline (Bénin) Company S.A. (Wapco), un accord relatif à la construction et à l’exploitation d’un système de transport des hydrocarbures par pipeline. Cet accord qui vient à la suite de diverses conventions passées avec la République du Niger, définit les conditions de construction et d’exploitation du pipeline devant permettre l’acheminement vers les marchés internationaux du pétrole brut du Niger par les côtes béninoises.
L’article 29.6 de l’accord prévoit que l’État béninois autorise les autorités publiques nigériennes à accéder au compteur du terminal sis dans le terminal de la société Wapco Bénin.
Le 03 juin 2024, le ministre de l’Énergie de l’eau et des mines de la République du Bénin, a confirmé à l’Administrateur général de Wapco Bénin, l’engagement de la partie béninoise à respecter les accords conclus mais a clairement indiqué que pour des raisons de sécurité, elle procèderait de manière encore plus avisée à la vérification de l’identité des personnes devant accéder au site.
Dans la soirée du mercredi 05 juin 2024, des informations de sources dignes de foi qui me sont parvenues, ont fait état de ce que des personnes se sont frauduleusement introduites sur le site de la station terminale de Wapco Benin à Sèmè-Podji.
Des investigations menées sur place, il ressort ce qui suit :
Cinq ressortissants nigériens se sont introduits sur le site sans décliner leur identité. Au lieu d’emprunter l’entrée principale et de s’enregistrer à la guérite, ces personnes ont préféré utiliser une entrée dérobée située à l’arrière du site. Dans cette manœuvre, elles ont bénéficié de la complicité de l’Administrateur général de Wapco Benin qui a pourtant reçu deux jours plus tôt, la lettre du ministre de l’Énergie, de l’eau et des mines à travers laquelle l’État béninois a exprimé de vives préoccupations sécuritaires.
Pour justifier cette entrée frauduleuse sur le site, les intéressés ont indiqué être tous des employés de Wapco Niger dont ils arborent les badges et précisé, qu’en cette qualité, ils n’avaient pas l’obligation de s’enregistrer à la guérite. Une telle justification est inopérante en raison de la sensibilité du site.
A l’étape actuelle, l’enquête a formellement établi qu’au moins deux parmi ces personnes, sont des agents nigériens au service du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (Cnsp). Ils se sont fait confectionner pour la circonstance de faux badges d’employés de Wapco Niger.
Les investigations se poursuivent pour déterminer les motivations réelles des mis en cause dans un contexte où des informations récurrentes font état de la planification d’actes d’atteinte à la sûreté de l’État du Bénin.
Je ne manquerai pas, s’il y a lieu, de vous apporter de plus amples informations sur l’évolution de cette enquête.
Je vous remercie
Fait au Parquet spécial, le 6 juin 2024
Le Procureur Spécial,
Elonm Mario Mètonou
Réaction du ministre nigérien du pétrole, Mahamane Moustapha Barké
«…Les équipes d’inspecteurs ont été arrêtées. Ils ont pris leurs téléphones et sont partis avec eux. Nous ne savons même pas où est-ce qu’ils ont été conduits. C’est vers minuit qu’on a eu contact avec le directeur général de Wapco qui m’a passé la directrice générale adjointe de Wapco à qui j’ai demandé quelle était la situation. Elle m’a dit qu’ils n’ont subi aucune maltraitance mais qu’ils attendent de voir ce qui va se passer. A partir de la nuit, on n’a plus su ce qui s’est passé. On nous a assuré qu’ils n’ont pas été arrêtés mais ils ont été interpellés. Toujours est-il qu’à l’heure où je vous parle, ils n’ont pas été libérés. Face à cela, le chef de l’Etat nous a donné des instructions fermes: si jusqu’à 17heures (jeudi 6 juin 2024 Ndlr), nous équipes ne sont pas libres de leurs mouvements, les membres ne sont pas remis dans leurs fonctions d’inspecteurs de cette cargaison, nous allons arrêter la station initiale de Cotonou. Nous avons répercuté cette instruction au directeur général des hydrocarbures qui a pris toutes les dispositions pour que cela soit effectif. No seulement le bateau ne pourra plus chargé, mais nous n’allons plus envoyer notre pétrole dans le pétrole jusqu’à ce que les Béninois décident de respecter leurs engagements et jusqu’à ce que le partenaire chinois les amène à respecter leurs engagements…»